L’environnement, le parent pauvre des mines
La contribution des sociétés minières au budget de l’Etat burkinabè en 2012 se lève à plus de 189,5 milliards de FCFA contre 127,4 Milliards en 2011, soit une progression de 49%. Ces chiffres à eux seuls montrent à quel point, le métal précieux est devenu très important pour l’économie du "pays des hommes intègres". Toutefois, comme partout ailleurs, son impact sur l’environnement fait qu’il faut agir avec prudence pour ne pas se retrouver un jour sans or ni ressources forestières, faunique ou halieutique. En effet, l’extraction de l’or implique une série d’impacts environnementaux. Les activités de prospection et d’extraction de minerai dégradent la qualité des sols. Dans les mines artisanales, le souci de l’environnement n’existe pas dans l’esprit des orpailleurs. Tout au plus, l’administration essaie de minimiser quelque peu les effets les plus graves sur la sécurité des exploitants. Mais ces mesures semblent dérisoires face aux conséquences de ces exploitations. En l’absence d’un encadrement des orpailleurs, leurs activités renforcent la destruction anarchique des sols et contribuent au déboisement des zones exploitées.
Dans l’orpaillage artisanal, des centaines de milliers de puits sont souvent abandonnés. Ils offrent ainsi le sol au ravinement et à des processus d’érosion intensive, aboutissant à une destruction totale du couvert végétal. Ce déséquilibre provoque, en plus, un sur-alluvionnement des vallées et leur asphyxie plus ou moins profonde. Ces processus sont quasi irréversibles et peuvent devenir catastrophiques à l’échelle de quelques générations. Ces exploitations anarchiques peuvent provoquer des effets convergents et causer de graves perturbations dans le drainage naturel des cours d’eau. Les roches dont les teneurs en or sont trop faibles pour être exploitées et le minerai stérile sont épandus aux alentours des sites d’extraction, impliquant des pertes pour les activités (élevage, agriculture) exploitant ces zones limitrophes. Par ailleurs, les déchets de l’extraction se répandent également par le biais du vent et de l’érosion et réduisent ainsi la fertilité des terres agricoles voisines. La pollution de l’air (poussières, particules fines) aux alentours des sites d’extraction a un impact sur la qualité de vie et la santé des ménages. Les poussières issues de l’extraction de l’or sont en effet particulièrement nocives pour la santé. Les trous, puits, galeries, monticules détériorent le paysage. Les individus se montrent sensibles à la qualité du milieu naturel les entourant. Le nettoyage du minerai nécessite d’importante quantité d’eau. La mise à disposition de cette dernière implique le détournement de cours d’eau et la création de capacités de retenue. Ces infrastructures peuvent engendrer des effets bénéfiques pour la population voisine (meilleur accès à la ressource « eau »). Toutefois, elles modifient fortement le bilan hydrique des régions et renforcent les conflits d’usage sur la ressource. Certains cours d’eau finissent ainsi asséchés, ce qui engendre une disparition de la faune et de la flore locale et des activités économiques traditionnelles les exploitant. L’eau utilisée pour nettoyer le minerai est rejetée souvent directement dans le milieu naturel sans traitement. L’usage de bassin de décantation n’est pas systématisé au Burkina Faso. Et lorsqu’ils existent, ceux-ci sont généralement sous-dimensionnés. L’eau ainsi rejetée est alors fortement chargée de matières en suspension et augmente la turbidité des cours d’eau. Il en résulte un impact fort sur la santé des travailleurs et la population locale. Dans les mines, l’usage de produits hautement toxiques (mercure, cyanure) pour l’amalgamation et la cyanidation de l’or augmente fortement la pollution des eaux. L’impact est potentiellement dramatique, tant sur la population que la faune locale. L’usage de produits chimiques, tels que les acides ou le mercure, compromet dangereusement la salubrité des eaux et des sols. En effet, ces produits chimiques perdus par amalgamation se retrouvent dans les systèmes de drainage, provoquant ainsi une contamination progressive de la chaîne alimentaire, à travers les poissons. Finalement, l’exploitation des mines comporte tellement de conséquences environnementales néfastes qu’il y a lieu de se demander si les sommes mirobolantes que l’exploitation de l’or apporte à l’économie du pays ne sont pas minimes, au regard de la destruction des ressources naturelles. La durée d’exploitation d’une mine n’excédant généralement pas 10 ans, il appartient à l’Etat de veiller à ce que le « boom minier » ne devienne pas à la longue un goulot d’étranglement pour le développement du Burkina Faso. Les richesses du sous-sol sont épuisables et il faut le savoir pour agir conséquemment.
Raphaël KAFANDO
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