Il faut sauver les habitats des oiseaux migrateurs
La migration annuelle du nombre d’oiseaux est estimée à 50 milliards. Ce qui représente environ 19 % des 100 000 espèces d’oiseaux du monde. C’est l’une des plus grandes merveilles que nous offre la nature. Toutefois, les aires de rassemblement, essentielles à leur migration, sont en train de se dégrader ou disparaissent complètement.
Ces sites de plus en plus vulnérables, qui constituent des étapes le long des itinéraires de migration, permettent aux oiseaux de se reposer, de se nourrir et de se reproduire au cours de leurs cycles de migration annuels. Du fait de la dégradation croissante de ces sites, certaines espèces risquent de disparaître en l’espace d’une décennie, tandis que d’autres sont confrontées à des pertes de population s’élevant jusqu’à 9 % chaque année. Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), de nombreux oiseaux migrateurs, tels que les grues, les cigognes, les oiseaux de rivage et les aigles, parcourent des milliers de kilomètres le long de voies de migration qui s’étendent sur plusieurs pays, plusieurs continents, voire le monde entier. Toutefois, les pressions résultant de la croissance démographique, d’une urbanisation rapide, de la pollution, du changement climatique et de l’utilisation non durable des zones naturelles, entraînent la disparition, la fragmentation et la dégradation des habitats naturels le long des itinéraires de migration des oiseaux, et mettent leur survie en péril.
Tout comme les systèmes humains de transport s’appuient sur tout un réseau de ports, d’aéroports et de routes, les oiseaux migrateurs sont tributaires des réseaux internationaux de sites naturels pour leur alimentation, leur sécurité, la reproduction et la mue, mais aussi pour servir d’aires de repos leur permettant de se ravitailler entre les aires de nidification et les autres aires. Les espèces d’oiseaux d’eau migrateurs qui sont tributaires des habitats intertidaux le long de la voie de migration Asie de l’Est-Australasie (EAAF) sont victimes d’un rapide déclin et font partie des oiseaux migrateurs les plus menacés de la planète. Le rythme accéléré de la mise en valeur des terres du littoral au sein de cette région densément peuplée est l’une des causes essentielles de ce déclin, tout particulièrement autour des zones littorales-clés de transit de la mer Jaune. Selon le rapport 2011 réalisé à la demande de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), les taux de déclin dans cette région sont parmi les plus élevés de tous les systèmes écologiques de la planète. Au moins 24 espèces d’oiseaux d’eau utilisant la voie de migration sont en voie d’extinction et de nombreuses autres espèces connaissent des pertes allant de cinq à neuf pour cent par an. Le rapport de l’UICN indique également qu’une espèce comme celle du Bécasseau spatule pourrait disparaître en l’espace d’une décennie. Il existe bien d’autres raisons justifiant la conservation des oiseaux migrateurs, ne serait-ce que leur beauté et leur comportement qui sont sources de joie et d’inspiration pour des millions et des millions de gens. Mais ils font aussi partie de la trame complexe de la vie qui étaye les services écosystémiques estimés à des milliers de milliards de dollars, tandis que dans certains pays, y compris au Kenya, ils font partie du tourisme axé sur la nature, qui génère 10 % du PIB.
Le Burkina ne doit pas rester en marge de cette lutte pour la préservation des habitats des oiseaux migrateurs. En effet, il dispose actuellement d’importants sites d’accueil d’oiseaux d’eau migrateurs parmi lesquels, quinze (15) sont reconnus comme sites Ramsar. Parmi ces endroits, on peut citer entre autres, la mare d’Oursi, la vallée du Sourou, la mare aux hippopotames, etc. On note dans ces zones, de fortes populations d’oiseaux d’eau constituant un élément important de la biodiversité mondiale, parmi lesquelles, des espèces globalement menacées qui ont besoin d’une attention particulière. A cet effet, des plans d’action spécifiques ont été élaborés au niveau international dans le cadre de l’Accord pour la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (AEWA). Ces plans d’action constituent un outil utile pour la conservation de ces espèces et leurs habitats au Burkina Faso. Au niveau mondial, des voies de migration sont reconnues pour les oiseaux d’eau. Deux d’entre elles, à savoir les voies de migration de l’Est de l’Atlantique et de la Mer Noire / Méditerranée couvrent entièrement ou partiellement le territoire du Burkina Faso. D’ou l’importance du pays pour la conservation des oiseaux d’eau migrateurs utilisant ces voies de migration. Car comme l’affirme le directeur adjoint du Programme mondial de l’UICN sur les espèces, Jean-Christophe Vié, « Les espèces migratrices sont intéressantes parce qu’elles mettent en lumière quelques-unes de nos propres contradictions. Nous aspirons constamment à nous déplacer librement tout autour du monde, alors que nous faisons tout le contraire pour les oiseaux migrateurs. Nous mettons constamment des obstacles entravant leurs itinéraires et nous rendons leurs voyages de plus en plus compliqués. C’est en fait la nature qui dicte les déplacements de ces espèces et nous avons tendance à oublier que, nous aussi, nous faisons partie de cette nature et devrions un peu mieux écouter ses règles »,
Raphaël KAFANDO
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