Le Burkina Faso déclaré "pays conforme" à l’ITIE et après ?
Lors du conseil des ministres tenu le mercredi 6 mars 2013, le ministre de l’Economie et des Finances a fait au conseil une communication relative à l’obtention par le Burkina Faso du statut de « pays conforme » à l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE). Le pays a obtenu ce statut lors de la session des 26 et 27 février et compte désormais parmi les pays où l’exécutif fait montre d’une gestion audacieuse, crédible, efficace et transparente du secteur des industries extractives. Pour le conseil d’administration international de l’ITIE qui siégeait à Oslo pour prendre sa décision, cela signifie que le Burkina Faso a mis en place des processus robustes de divulgation et de rapprochement annuels de tous les revenus du gouvernement issus du secteur minier. Ces chiffres sont accessibles au public, qui a ainsi la possibilité de voir ce qu’obtiennent les autorités en retour par l’exploitation des ressources naturelles. Pour la première fois, plus de la moitié des pays qui mettent en œuvre l’Initiative sont désormais « conformes à l’ITIE ». En Afrique, 10 pays sont désormais conformes à l’ITIE (Liberia, Mali, Niger, Zambie, Ghana, Nigeria, Tanzanie, Mozambique, Burkina Faso, Congo-Brazzaville). Au Burkina-Faso, la production d’or est en très forte augmentation puisqu’elle est passée de 23,1 tonnes en 2010 à 36 tonnes en 2011, ce qui représentait 190 millions d’euros de revenus pour le gouvernement cette même année. En 2012, la production devrait être de 42 tonnes. Le "pays des Hommes intègres" a publié son premier rapport ITIE en 2008. Il aura mis seulement trois ans à obtenir sa conformité. Pour garder cette conformité, le Burkina devra continuer à publier ses revenus extractifs de manière exhaustive, en conformité avec les chiffres des entreprises avec ceux du gouvernement, sous le regard de la société civile. Tous les paiements matériels, versés par les entreprises aux gouvernements, au titre de l’exploitation minière (les paiements) et toutes les recettes matérielles, reçues par les gouvernements de la part des entreprises minières (les recettes), doivent être publiés et diffusés régulièrement au grand public sous une forme accessible, complète et compréhensible. L’ITIE est un outil important pour le parlement, afin qu’il puisse comparer ce que les entreprises disent avoir payé et ce que le gouvernement perçoit effectivement. C’est un moyen d’avoir l’œil sur la gestion des ressources naturelles. C’est pourquoi le gouvernement a l’obligation de faire participer la société civile activement à la conception, au suivi et à l’évaluation de ce processus. Si ces principes ne sont pas respectés, le Burkina pourrait connaître le même sort que le Gabon qui a été radié par le Conseil d’administration de l’ITIE ou de la Sierra Leone, de la Mauritanie et du Yémen qui ont été suspendu temporairement. En effet, le Conseil a conclu que le deuxième exercice de validation ITIE du Gabon qui avait été terminé en retard, indiquait qu’aucun progrès significatif n’avait été réalisé. La Sierra-Leone a terminé son deuxième exercice de validation indiquant des progrès notables, mais n’est toujours pas parvenue à la conformité. Le Conseil d’administration de l’ITIE a conclu qu’une courte période de suspension serait appliquée pour prendre des mesures correctives nécessaires. La Mauritanie et le Yémen n’ont, quant à eux, pas encore publié leurs rapports 2010 tels que requis par les règles de l’ITIE en matière de déclaration régulière et ponctuelle. Le dernier rapport du Yémen date de 2007. Cela signifie que le Burkina Faso ne doit pas dormir sur ses lauriers, mais doit s’atteler à une exploitation prudente des richesses en ressources naturelles pour une croissance économique qui contribue au développement durable et à la réduction de la pauvreté. Par ailleurs, il est important que les gouvernements et les entreprises extractives assurent la transparence, ainsi que la nécessité de renforcer la gestion des finances publiques et de faire respecter l’obligation de rendre compte. De plus, il faut que la société civile et plus largement le citoyen lambda puisse chacun jouer son rôle en s’assurant non seulement que ces principes sont respectés mais aussi en cherchant l’information exacte auprès des services de l’Etat et auprès des sociétés minières.
Raphaël KAFANDO
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