Orpaillage au Burkina : arrêtons le fatalisme
Un éboulement est survenu, le jeudi 19 juillet 2012, sur un site d’orpaillage à Bouéré, localité située à quelques encablures de la ville de Houndé. Bilan : deux morts et trois blessés ! Des situations dramatiques du genre, le Burkina Faso en a déjà connu, avec toujours, à la pelle, des morts et des blessés. En plus du drame humain provoqué par ce fléau, il faut ajouter les conséquences environnementales gravissimes entraînées par cette forme de recherche de gain au Burkina. Dans le rapport final du Projet Mercure mondial, l’ONUDI estime que près de 100% du mercure utilisé par le secteur de l’orpaillage est rejeté dans l’environnement, soit sous forme de liquide ou de vapeur. La vapeur de mercure peut être transportée assez loin par les vents. Elles se déposent sur les sols, les végétaux, les plans d’eau et les aliments non protégés ou même être précipitées sous forme de pluie acide, etc. Il faut noter également que l’exploitation minière artisanale contribue également au déboisement et à la déforestation, à la dégradation des sols, à la pollution de l’air par la poussière et le monoxyde de carbone, du sol et de l’eau par les huiles usagées des moteurs et les produits chimiques (les piles usagées abandonnées au fond des puits contenant du manganèse ou plomb), la perte de la biodiversité, la détérioration du paysage etc.
Au plan sanitaire, elle peut engendrer des maladies respiratoires (toux, pneumonie, angine…) du fait de l’inhalation de la poussière et des accidents souvent mortels, compte tenu des techniques d’extraction du minerai qui s’avèrent archaïques.
Au plan social, cette activité entraîne la dépravation des mœurs sur les sites d’exploitation, ce qui peut faire accroître le taux des maladies sexuellement transmissibles. Elle contribue à vider les classes de leurs élèves qui doivent aider leurs parents dans l’extraction, ce qui conduit à une baisse du taux de scolarisation dans les zones d’exploitation.
Le problème est que malgré le fait que les autorités connaissent toutes ces conséquences, l’on a l’impression qu’il existe un certain aveu d’impuissance face à ce fléau. La réalité est que face à une situation de pauvreté souvent très accrue des populations, l’Etat tend à tolérer ou à s’accommoder d’une telle pratique qui occupe des milliers de personnes. En effet, l’activité d’orpaillage au Burkina, se mène sur des centaines de sites et procure des revenus à plus de 200 000 personnes vivant principalement en milieu rural. Pour un pays comme le Burkina Faso, défavorisé par son climat, l’orpaillage est un puissant moyen de lutte contre la pauvreté après l’agriculture et l’élevage, vu le nombre important d’emplois qu’il crée, surtout en période morte ou en période de mauvaise récolte. Toutefois, ces avantages ne doivent pas conduire à perdre de vue les conséquences gravissimes de cette activité sur l’environnement, la sécurité et la santé des Burkinabè.
A cet effet, les décideurs, les techniciens, la société civile, les responsables coutumiers et religieux, ainsi que les orpailleurs doivent œuvrer chacun à une bonne organisation de cette activité porteuse. C’est pourquoi, il convient de mener des campagnes intenses de sensibilisation des orpailleurs aux risques et dangers associés à l’utilisation et à la manipulation sans protection ni précaution du mercure. Il est important de réglementer aussi la vente, l’achat, le transport et l’utilisation du mercure sur l’ensemble des sites d’orpaillage en activité. De plus, il est primordial que tous les sites d’orpaillage importants fassent l’objet d’un recensement, d’une étude de cartographie et de caractérisation physico-chimique dans la perspective d’une meilleure gestion de l’environnement minier.
Raphaël KAFANDO
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