Caniveaux ou poubelles ?
Des plastiques, des bidons de boissons gazeuses, des pneus, de vieilles chaussures, des pagnes d’un autre siècle, etc. Tel est le spectacle désolant qu’offrent la plupart des caniveaux de Ouagadougou. Et chaque année, c’est l’éternel recommencement. Pendant que la mairie dépense des millions de FCFA pour curer les caniveaux, les populations ont le malin plaisir de les remplir de déchets, au mieux, dans l’année qui suit et au pire, dans les jours qui suivent. Par exemple, en 2007, la mairie de Ouagadougou a dépensé, en somme 100 millions de FCFA, rien que pour le curage des caniveaux. Il n’est un secret pour personne que les caniveaux sont conçus pour draîner exclusivement les eaux pluviales et non les eaux usées ou pour servir de toilettes et de poubelles pour les riverains de ces infrastructures. Pourtant, l’on a l’impression que les populations confondent souvent les réseaux d’égouts conçus et aménagés par l’Office national de l’eau et de l’assainissement (ONEA) pour draîner les eaux usées domestiques et industrielles et les canaux construits par la mairie pour les eaux pluviales. Résultat, les caniveaux sont bouchés, accroissant davantage les risques d’inondations. De plus, ces endroits se retrouvent être le terreau de certaines maladies comme le paludisme ou le choléra. Selon les textes, il est interdit de construire des kiosques sur les caniveaux, mais rien n’y fit, ce type de commerce fait légion dans la capitale burkinabè. Malgré les multiples déguerpissements du bourgmestre de Ouagadougou, les caniveaux de Ouagadougou sont pris en otage par ces mécaniciens, boutiquiers et autres qui ont choisi ces lieux pour mener leurs activités. Peu importe si cela devrait peut-être leur coûter la vie, l’essentiel pour eux, est d’avoir leur pitance quotidienne. Certaines personnes poussent même l’outrecuidance très haut en déversant, nuitamment, les contenus de leurs WC dans les caniveaux. Gare à vous si vous êtes proche de ces caniveaux ou dans lesquels divers chiens écrasés et toutes sortes de déchets se croisent et se bousculent, formant une alchimie dont la seule vue suffit à contracter des maux de ventre. En plus de supporter les odeurs nauséabondes, vous supporterez le courroux des voisins, si vous osez vous plaindre de ces mauvais agissements. Toutefois, si les populations, par leur incivisme, mettent les caniveaux en danger, il n’en demeure pas moins que l’Etat a aussi un rôle à jouer. Premièrement, les autorités ont le devoir de veiller à ce que la législation en la matière soit appliquée, quelles que soient les résistances des populations. Il faut, non seulement des actions de sensibilisation, mais aussi de répression contre les éventuels récalcitrants. Il est vrai que l’état d’incivisme ambiant au « pays des hommes intègres », de nos jours, freine les ardeurs des autorités, mais ce n’est pas pour autant qu’ils ne doivent pas assumer leur responsabilité pour le bien-être de la cité. Il y a également que l’Etat doit rétablir certains caniveaux qui, après juste quelques années d’existence, sont déjà dégradés. En effet, moins le caniveau est entretenu, plus les populations ont tendance à transformer l’endroit en poubelle publique. Bref, l’un dans l’autre, il est temps que chacun prenne ses responsabilités, en tentant de faire de son cadre de vie immédiat un endroit propre où il fait bon vivre. Pour l’instant, Ouagadougou reste une capitale relativement propre, comparativement à certaines villes de la sous-région, mais ce n’est pas pour autant qu’il faut dormir sur ses lauriers, car à force de tolérer certaines pratiques inciviques, il ne faut pas s’étonner un jour, de faire partie des capitales les plus sales de l’Afrique.
Raphaël KAFANDO
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